4.8.11 : Minuit suspendu
Je rentre chez moi en vélo. Rue de Clichy la circulation est bloquée par la police un peu avant le Casino de Paris. On s’arrête tous, vélos, voitures, motos. Il est minuit.
Un tournage a lieu devant le Casino. Une technicienne avec talkie-walkie barre officiellement la rue et nous demande de patienter deux petites minutes.
Au loin on voit l’éclairage blanc, les équipes de machinistes, des figurants. Quelque chose se passe.
Une cycliste demande à la femme si on ne peut pas figurer à l’écran. Non. Pourquoi, on n’est pas assez beaux ? Sourire de la technicienne, sourires des motards et de moi. On commence à devenir humains. Un homme demande de quel film il s’agit. La jeune femme donne le titre et les deux acteurs principaux, Clovis Cornillac et Manu Payet.
Derrière, une longue file de voitures. Personne ne klaxonne, tous attendent gentiment.
Au loin on sent un brouhaha, les figurants s’agitent, une silhouette sous la lumière débite du texte. La scène se tourne, ça dure quelques instants.
Puis le talkie-walkie grésille quelque chose. Comme quelqu’un qui donne le départ d’une course, la technicienne lève son bras, crie “merci beaucoup d’avoir patienté messieurs dames !” et s’écarte de la chaussée.
Les moteurs se rallument. Les engins de tête grimpent la rue. La circulation reprend son cours. Nous redevenons inhumains.
Ca me fait penser à cette scène de la Bourse dans "L’Éclipse" d’Antonioni, où une minute de silence est demandée en hommage à la mort d’un trader.